Un auteur peut-il être original?

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Le moment où j’ai voulu être originale

Il y a quelques années, j’ai écrit un roman de science-fiction postapocalyptique sur le thème de la survie en milieu aquatique. À l’époque, ceux à qui j’en parlais me demandaient si j’avais vu le film « Waterworld » (un film sorti en 1995 avec Kevin Costner), dont l’action se déroule également sur Terre, une terre dont les pôles ont fondu et qui se est recouverte par les eaux.
À l’époque, je répondais invariablement à mes proches « Non, je ne veux pas visionner ce film, j’ai trop peur qu’il m’influence et qu’il influence mon écriture ». Car voyez-vous e voulais à tout pris être originale.
J’ai terminé l’écriture de mon roman.
Et aujourd’hui, j’ai enfin visionné le film.
Je dois dire que j’ai été très intéressée par le traitement du thème de ce film. Il est en effet très similaire au thème de mon roman, même si ma propre oeuvre ne se déroule pas sur un monde entièrement recouvert d’eau. (« Seulement » 70 % des terres sont immergées)
C’est alors qu’une réflexion m’est venue, traitant de l’inspiration.
Comme vous avez peut-être dû le lire ou l’entendre, les créateurs de fiction s’accordent à dire qu’il existe peu de thèmes à traiter en fiction, que tous les grands thèmes, tels que l’amour, la mort, la vengeance, la liberté, ont déjà été traités un nombre incalculable de fois par les écrivains, les dramaturges, les cinéastes, bref, les auteurs de fiction.
Donc, au fur et à mesure que j’avançais dans le film, je me suis demandé comment, moi, j’avais traité mon sujet de la Terre envahie par les eaux par rapport aux auteurs du film.
Et j’ai été très étonnée.

Originale, vous avez dit originale?

Alors que je n’avais aucune information sur le film au moment de l’écriture d’Au-delà de l’Horizon, j’ai retrouvé énormément de thématiques, de détails et d’idées similaires entre les deux œuvres.
Par exemple :
• Les deux œuvres sont à la recherche d’une Terre promise. Elle prend la forme d’une île avec de la vraie « terre » où poser ses pieds dans Waterworld, alors que dans mon roman, elle se situe sur une planète inconnue. Mais dans les deux cas, il s’agit bien d’un endroit où vivre, et si possible, vivre mieux.
• Dans les deux fictions, des humains aux allures de « poissons » apparaissent : Kevin Costner a des branchies qui lui poussent derrière les oreilles, alors que dans mon roman, des êtres mutants se voient dotés de pieds palmés et également de branchies.
Au-delà de ces similitudes, ce qui m’interpelle est la chose suivante :
Comment un auteur trouve-t-il ses idées et arrive-t-il à être original en partant du principe que les mêmes causes produisent les mêmes effets ?
Tout comme il y a une logique du langage (ce que nous enseigne la grammaire avec son « sujet-verbe-complément »), y a-t-il, pour citer Gianni Rodari, un spécialiste de la création littéraire, une « grammaire de l’imagination » ?
Et pour creuser un peu plus, cette grammaire de l’imagination, d’où nous vient-elle ? De l’inconscient collectif, comme a nommé le psychiatre Jung la mémoire de l’humanité ?
Oserais-je dire, en me basant sur ce qui a été dit plus haut, qu’il y a également une grammaire de la création ? Malgré le fait que les auteurs « traitent » les mêmes éternelles thématiques de manière « originale » ?
Mais où se trouve l’originalité dans cette création si mes personnages respirent avec des branchies, tout comme l’avait imaginé le créateur d’un film sorti il y a 20 ans ?
Bon, il semble naturel pour un auteur d’imaginer que les hommes subissent des mutations et qu’ils en viennent à respirer sous l’eau quand on crée un monde futur où l’eau est l’élément terrestre dominant.
Car après tout, la science-fiction, c’est bien de la science avant tout.
Et vous, cher lecteur, si vous aviez écrit cette histoire, auriez-vous doté vos mutants de pieds palmés et de branchies ? Ou auriez-vous inventé quelque chose de complètement différent?
L’originalité, heureusement, existe dans mon livre. Par exemple dans mon traitement du « méchant », qui n’a rien à voir avec la brute épaisse façon corsaire du film. Mon méchant à moi, il est VRAIMENT original.
Mais je ne vous dirai rien aujourd’hui sur ce sujet.
La prochaine fois peut-être.

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Author: Alex

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